Le 13 février, Magali Reghezza, Membre du haut conseil pour le climat participait à l’atelier-débat n°2 dans le cadre de VITRY CAP 2030.
Records de chaleur, sècheresses, méga-feux, inondations… Ce n’est plus une crise mais un changement d’ère. Sans ergoter, les décideurs doivent engager les politiques pour gérer les conséquences du changement climatique et décarboner l’activité humaine. Si nous agissons, l’amélioration peut être rapide et la catastrophe évitée.
Les objectifs
- Adapter la ville à l’inéluctable changement climatique
- Limiter l’empreinte carbone de la ville







On peut y arriver vite et bien.
Il faut le courage de planter des graines pour le futur
Si la France tient ses objectifs, ça peut aller très vite. L’action individuelle est efficace si elle s’intègre dans un cadre collectif, de la commune au monde. L’État doit fixer un cap, des priorités et une redistribution juste des moyens. On estime qu’il faut 50 milliards d’investissement par an pour réussir le pari.
Plus qu’une transition écologique, c’est une révolution technologique, industrielle, agricole, juridique, et sociale
Il faut inventer un nouveau mode de vie et de consommation. La promesse d’une issue par la technologie est une impasse. Travail, habitat, mobilité, agriculture, alimentation… il va falloir changer dans tous les domaines. Il faut trouver des alternatives, réemployer, recycler… C’est un projet global, qui inclut des villes plus agréables, des conditions de travail meilleures, le temps de vivre…
Il faut modifier et réduire les mobilités contraintes
Il faut rapprocher lieux de vie et de travail ; réduire les temps de trajets quotidiens ; privilégier les transports moins polluants à la voiture individuelle, la voiture électrique à la thermique, les petites citadines au SUV. Des véhicules électriques toujours plus lourds et suréquipés ne sont pas une solution.
Il faut résoudre le problème des passoires énergétiques
Le logement social est souvent le mieux isolé. Une mise aux normes environnementales rapide et efficace de l’habitat justifie la création d’un service public de la rénovation : pour aider les petits propriétaires sans moyens ; assurer un diagnostic énergétique fiable et une rénovation réussie ; une utilisation judicieuse des aides. Il faut aussi envisager des solutions comme la mutualisation des espaces (buanderie, co-working…). Pour que tout cela marche, il faut que chacun y mette du sien : le quartier, la commune, l’interco, la métropole…
Il faut répondre à la crise du logement sans bétonner
Il faut rénover plutôt que démolir. Construire nécessite 70 fois plus de matériaux et 5 fois plus d’émission de GES que rénover. La densité des villes n’est pas une fin en soi. Elle n’entraine pas systématiquement l’artificialisation des sols car la ville peut évoluer sur elle-même. Certaines villes assument une décroissance démographique car au-delà d’un certain seuil, elles considèrent qu’elles n’apportent plus les services et la convivialité nécessaires au bien-être. Doit-on concentrer les habitants dans les métropoles et laisser du vide autour pour produire l’énergie et l’alimentation ? Ou développer des villes moyennes reliées par le train et qui maillent le territoire et permettent une agriculture écologique ? Il faut résorber l’énorme gâchis des logements et bureaux vides en les réquisitionnant.
Il faut cesser de construire en zone inondable
On ne sait pas quand, mais une nouvelle crue dévastatrice se produira. Malgré, la sécheresse, les pluies diluviennes couplées à l’imperméabilisation des sols entrainent des crues plus intenses. Lors d’une grande crue, l’eau peut atteindre le premier étage. La fourniture d’eau potable et d’électricité, le métro sont interrompus. Une crue équivalente à celle de 1910 nécessiterait d’évacuer 1 million de personnes, les hôpitaux, les maisons de retraite…
Les digues ne protègent pas de tout. Il faut éviter de construire en zone inondable et destiner ces terrains à d’autres usages : agriculture, géothermie, parc urbain, terrain de sport, espace culturel, stockage de l’eau et du carbone…
La commune détient des leviers pour agir. Proche des citoyens, elle facilite leur engagement
Il faut changer de projet urbain pour améliorer la qualité de vie. On va payer très cher la bétonisation, l’imperméabilisation des sols, la diminution des végétaux et de la biodiversité, un cadre de vie détérioré… les conséquences sont durables et parfois irréversibles. Au contraire, la végétalisation engendre du bien-être. La mutualisation des équipements publics diminue la pollution et favorise les rencontres. Le recul de la voiture thermique va diminuer sensiblement les allergies et la surmortalité induites par les microparticules. C’est aussi plus de vélo et de marche, plus de petits commerçants, de circuits courts et de lien social. Il faut développer des services comme la navette interquartiers permettant d’aller au marché ou chez le médecin en papotant avec ses voisins. La commune peut accompagner les particuliers pour l’obtention des aides à l’isolation et les entreprises pour opérer leur mutation.
Dire ce qui est juste ou injuste : une affaire de choix démocratique
Cette révolution des modes de vie, pour être populaire, doit être juste et démocratique. Il faut faire tout cela sans être régressif pour les classes moyennes et populaires.
L’inaction climatique pèse sur elles. Mais l’action climatique n’est pas obligatoirement juste. Pour être majoritaire, ce projet de vie doit être vécu positivement. Vivre dans un logement où il fait bon, marcher dans la rue sans s’intoxiquer, manger des tomates qui ont goût de tomate, bien travailler pour l’intérêt général et avoir du temps pour soi, pour lire ou faire du sport, jardiner et cuisiner avec les petits-enfants… Vivre bien en soignant la planète, ce n’est pas si compliqué ! Les gens, inquiets, sont prêts à changer. Mais ils veulent décider vers quel monde nous allons. λ
Ce qu’il faut savoir
- Si on continue, le réchauffement climatique rendrait de nombreux territoires invivables. En France, les températures de 50 °C seraient banales dès 2030.
- Le réchauffement est dû à l’accumulation de gaz à effet de serre (GES) comme le CO2. Seuls les végétaux et les océans peuvent les absorber.
- 10 % de la population mondiale émet 30 à 40 % des émissions totales.
- 80 % de l’énergie utilisée est carbonée (pétrole, charbon, gaz…) en France et dans le monde.
- Les trois principales sources de GES en ville sont les transports routiers, l’industrie et le logement.
- Un Français produit en moyenne 9 tonnes de CO2 par an. Cette moyenne est de 5 tonnes pour la moitié la moins riche de la population.
- La «Règle verte» consiste à évaluer l’impact écologique de chaque décision et à se demander si elle est compatible avec une société neutre en émissions de carbone.
- On peut atteindre l’ensemble des objectifs de bien-être en atteignant la neutralité carbone.
- Il y a les solutions et les capitaux nécessaires pour cela.
- Des services publics qui fonctionnent réduisent la vulnérabilité en cas de crise.
